Ralbaye Sylvie Nang-Yadji, jeune slameuse tchadienne, originaire de Sarh. Cette jeune fille de la vingtaine n’a pas découvert le slam comme un art connu, mais comme une expression personnelle, une révélation inattendue. En 2021, lors de sa cérémonie de graduation à l’Université Jésuite/CERAP d’Abidjan, Sylvie monte sur scène pour partager un texte en hommage à ses condisciples et enseignants. Ce qu’elle pensait être un simple moment de partage devient un tournant décisif dans sa vie, un événement fondateur. Elle découvre la puissance des mots, l’impact des émotions sur le public, et surtout, la naissance d’une nouvelle version d’elle-même : une slameuse.
Ce jour-là, Ralbaye Sylvie comprend que les mots peuvent toucher des cœurs, libérer des esprits et créer des ponts émotionnels avec les autres. C’est ainsi qu’elle réalise que ce qu’elle faisait, sans le savoir, s’appelle “slam”. Dès lors, elle décide de s’approprier cet art pour exprimer sa vision du monde et ses émotions profondes.
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Une voix révélée par le slam comme sa thérapie
Avant de découvrir le slam, Sylvie était une personne introvertie, enfermée dans ses complexes et victime de moqueries. Son apparence physique et sa manière de parler étaient souvent raillées, la plongeant dans une phase difficile de sa vie. Cependant, le slam lui offre une voie de guérison. Pour elle, cet art devient un “souffle de vie”, un moyen de se libérer et de transformer sa douleur en force. Le slam n’est pas seulement un art pour Sylvie, c’est un terrain de combat personnel où elle combat ses peurs et ses doutes.
Après cette première expérience marquante, Sylvie se plonge dans le monde du slam. Elle crée rapidement une page dédiée à ses prestations et commence à se produire lors des événements de son université. Son talent et son authenticité ne passent pas inaperçus. Lors d’une performance devant le Premier Ministre ivoirien, Dr Robert Beugré Mambé, elle est invitée à se produire pour un événement en mémoire de sa défunte épouse, Marthe Irma. Sylvie reçoit ensuite le prix « Mambé Marthe Irma », une distinction honorifique qui souligne la qualité de ses prestations.
Un style unique et apprécié
L’une des forces de Sylvie dans le slam est son originalité. Contrairement à beaucoup de slameurs qui cherchent à imiter des modèles existants, elle parvient à tracer son propre chemin. Lors d’une émission télévisée, les grands slameurs ivoiriens Amee Slam et Placide Konan saluent cette particularité. Ils lui reconnaissent un style distinct, une voix qui ne cherche pas à reproduire mais à créer. Ce compliment renforce sa détermination et l’incite à développer des projets engagés à travers son art.
Un parcours académique exemplaire
Sylvie n’est pas seulement une artiste, elle est aussi une étudiante accomplie. Après avoir obtenu un baccalauréat A4 au Lycée-Collège Saint Charles Lwanga de Sarh, elle poursuit ses études supérieures avec brio. Titulaire d’une Licence en Sciences Économiques et de Gestion, option Management des Organisations et des Projets, elle obtient ensuite un Master en Éthique et Gouvernance, option Gestion des Conflits et Paix, à l’Université Jésuite/CERAP d’Abidjan. Actuellement, Sylvie poursuit un autre Master en Prévention et Gestion des Risques et Crises dans l’espace francophone, prouvant ainsi sa soif de connaissance, sa polyvalence et son engagement dans la gestion des enjeux complexes du monde contemporain. Et quoi de mieux que le slam pour se tracer la route d’or.
Des projets engagés pour la société
Le slam, pour Sylvie, est plus qu’un simple moyen d’expression. Elle l’utilise comme un levier pour aborder des problématiques sociales. Ses projets actuels reflètent cet engagement. Le premier, « Touche pas à mon éducation », vise à interpeller le gouvernement tchadien sur l’urgence de réformer le système éducatif. Le second, « Sarh dans nos veines », est un hommage à sa ville natale, Sarh, surnommée la “Ville verte”. Dans ce texte, elle appelle les habitants à prendre en main le développement de leur ville.
Une slameuse hors pair
Ralbaye Sylvie Nang-Yadji n’est pas une slameuse comme les autres. Son parcours, marqué par la résilience et l’authenticité, fait d’elle une artiste à part entière. Le slam a changé sa vie, l’a libérée de ses chaînes personnelles, et lui a donné une voix à travers laquelle elle exprime sa vision du monde. Entre ses études, ses engagements sociaux et son art, Sylvie se dessine un avenir prometteur, où le slam reste son moyen de conquête, son terrain d’action et de transformation. Prête à marquer la scène artistique du Tchad et au-delà.