La plume de Noussayba Lahlou : Une ode à l’indépendance

Noussayba Lahlou est une artiste dont la plume puissante et l’engagement ont fait d’elle l’une des voix les plus prometteuses de la scène slam marocaine. Passionnée par les mots et la littérature, elle trouve dans l’écriture un espace de liberté où chaque terme devient un outil pour exprimer des émotions profondes et des réflexions sur le monde qui l’entoure. Le slam, pour elle, s’est imposé comme une forme artistique accessible et percutante, capable de transcender les contraintes musicales pour mettre en avant la force du texte. C’est en découvrant ce style sur une plateforme internet qu’elle a ressenti l’appel de la scène, encouragée dès ses débuts par son père.

Originaire de Ksar El Kébir, mais profondément marquée par ses expériences à Tanger et El Jadida, Noussayba puise dans ses racines et ses rencontres pour nourrir ses créations. Son art est empreint d’indépendance, de rébellion, mais aussi de solitude et d’amour, des thèmes récurrents dans ses textes qui traduisent avec intensité ses états d’âme. Polyglotte, elle fusionne plusieurs langues et genres musicaux, reflétant la diversité culturelle du Maroc et son propre parcours identitaire.

Animée par l’engagement, Noussayba considère l’art comme un outil de transmission de valeurs. Influencée par des artistes tels que Diam’s, IAM, ou encore Léo Ferré, elle met un point d’honneur à écrire des textes de qualité. À travers ses futurs projets musicaux et ses ateliers d’écriture, elle souhaite inspirer les jeunes générations à rester fidèles à elles-mêmes et à ne jamais refouler leurs émotions.

Afro Slam a eu le plaisir d’interviewer ce talent unique !

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Afro Slam : Qui est Noussayba Lahlou ?

Noussayba Lahlou : Une jeune femme passionnée par les lettres, la littérature et la poésie. Qui trouve un plaisir à rester des heures devant un mot, à l’observer, le décortiquer, en faire jaillir d’autres, ou bien le chanter.

Afro Slam : Peux-tu nous parler de tes débuts en tant que slameuse ? Qu’est-ce qui t’a attirée vers cette forme d’art ?

Noussayba Lahlou : Je trouve que le slam en tant que tel est assez accessible et c’est ce qui le rend attirant et tentant pour n’importe quel débutant. C’était pareil pour moi en écoutant un slam, sur une plateforme sur internet, (à l’époque, il n’y avait pas YouTube ou peut-être que je l’ignorais). J’ai trouvé que c’était beau, simple et va droit au but. Qu’il échappait à plusieurs contraintes musicales qui parfois peuvent nuire aux textes et à son sens. Et j’ai décidé de m’y lancer en me disant « je veux faire la même chose ». J’ai performé mon premier texte devant mon père, qui a été surpris et depuis n’a cessé de m’encourager à écrire.

Afro Slam : Comment ton environnement à Ksar El Kébir et à Tanger a-t-il influencé ta musique et tes écrits ?

Noussayba Lahlou : Jeune, j’ai quitté Ksar El Kébir et je n’avais pas vraiment d’influences ou de lien avec cette ville où j’ai passé une partie de mon enfance et de laquelle je garde certainement des influences que j’ignore encore. Mais je me sens complètement détachée et différente des gens de cette ville. Peut-être que je garde un accent qui sort inopinément dans les moments imprévus, ou quelques mots que seuls les Kasraoui comprennent et utilisent. Cependant, le grand lien et la plus grande influence est ma grand-mère, qu’elle repose en paix. C’était le lien qui me liait à cette ville, par son émancipation, son indépendance, quelquefois pudique. Ksar El Kébir, pour moi, c’est un mélange de souvenirs.

El Jadida, la ville où j’ai passé une partie de mon enfance et de mon adolescence, m’a énormément marquée. C’est là que j’ai développé ma passion pour l’écriture, la culture et l’engagement culturel. Comme on ne choisit pas son lieu de naissance, Ksar El Kébir n’est pas une ville que j’ai choisie, El Jadida non plus. Mais me retrouver à Tanger n’est point un hasard, car je l’ai bien choisie. J’ai même été contrainte à quitter mon travail pour enfin m’installer dans cette ville. Et bizarrement, même les textes que cette ville m’inspire respirent l’indépendance et la rébellion. Les rencontres que j’ai faites dans cette ville et les échanges ont influencé mes chansons d’une façon ou d’une autre. Je suis reconnaissante d’avoir ce parfum, ce ton tangérois dans mes créations.

Afro Slam : Quels thèmes reviennent souvent dans tes chansons, et pourquoi sont-ils importants pour toi ?

Noussayba Lahlou : Indépendance, rébellion, colère, solitude, amour, des choses, des sensations qui me traversent et que je n’ai guère envie de refouler, mais de vivre intensément. Ils s’imposent à moi, et je les accepte.

Afro Slam : Tu mélanges plusieurs genres musicaux et plusieurs langues dans tes différentes compositions. Qu’est-ce qui t’inspire cette fusion ?

Noussayba Lahlou : Je suis polyglotte et j’ai une passion pour les langues. Cela se reflète dans mes différentes compositions, qui sont également influencées par la richesse de la culture marocaine. Être marocain, pour moi, signifie être plus qu’entre deux cultures ; c’est naviguer entre plusieurs. J’intègre la culture arabo-musulmane, la culture amazigh, ainsi que l’influence de l’Occident et du monde contemporain. Parfois, je me sens même européenne. Tout cela se mélange et se reflète dans mes créations musicales. Ce n’est pas pour rien que mon premier slam publié était « Crise d’identité »

Afro Slam : Peux-tu nous parler d’une chanson en particulier qui te tient à cœur et de son histoire ?

Noussayba Lahlou : Beaucoup, beaucoup de chansons me tiennent à cœur, mais si je devais en choisir une, ce serait “Le Vent nous portera”. Pas d’histoire particulière, c’est une chanson que j’aime écouter et qui, juste après, me donne l’envie d’écrire.

Afro Slam : Quel rôle joue l’engagement dans tes textes ? Est-ce quelque chose que tu cherches à transmettre à ton public ?

Noussayba Lahlou : Au-delà du fait de transmettre, c’est ce qui anime mes écrits. Je ne conçois pas l’art comme une sorte de mouvement parnassien. Il a bien une finalité. Chaque artiste est un porteur de valeurs et de positionnement. La neutralité, ce n’est pas mon truc.

Afro Slam : Quels artistes ou musiciens t’ont influencée dans ton parcours ?

Noussayba Lahlou : Au tout début, j’ai découvert Diam’s, puis IAM, puis Youssoupha, Léo Ferré, Barbara. Je m’attache beaucoup au texte. La qualité d’écriture est la première chose qui m’attire dans une chanson. Après vient la composition.

Afro Slam : Comment ressens-tu la scène slam actuelle au Maroc et ton rôle au sein de celle-ci ?

Noussayba Lahlou : Très calme, il faut la secouer. Je ne prétends pas avoir un rôle pour changer la scène slam, mais je pense que des petits ateliers par-ci, un concert slam par-là, peuvent donner envie aux gens d’écrire et de partager leurs écrits. Je voudrais par ce biais saluer le travail que fait l’association Slam Maroc pour leurs efforts et leur engagement.

Afro Slam : As-tu des projets futurs ou des collaborations en vue ? Si oui, peux-tu en parler ?

Noussayba Lahlou : Oui, les projets, c’est ce qui m’anime. J’ai une chanson que je prépare en collaboration avec The Local Session, produite divinement par Abdous. J’ai également un projet d’EP qui, pour l’instant, me demande beaucoup de temps, mais que je finirai par finaliser. Sans oublier les ateliers d’écriture et les rencontres avec des talents inspirants.

Afro Slam : Comment gères-tu les moments de doute ou de blocage créatif ?

Noussayba Lahlou : J’écris des textes sur ça !

Afro Slam : Quel message souhaites-tu transmettre à travers ta musique, surtout aux jeunes générations ?

Noussayba Lahlou : Être intègre, soi-même, honnête même quand personne ne regarde.