Sur scène, elle capte l’attention d’un simple regard. Dans ses textes, chaque mot semble porté par une urgence intérieure. Fatine Fatmi, slameuse et poétesse marocaine, s’est hissée à la deuxième place du championnat national de slam-poésie DKLAM 2025. Mais au-delà de ce titre, c’est un parcours d’écriture et de partage qu’elle incarne, entre révolte intime et ouverture au monde.
A lire : Portrait : Amine Mkallech, champion du Maroc de slam-poésie 2025
Tout commence dans le silence d’une chambre d’enfant. Très jeune, Fatine découvre l’écriture comme un espace de refuge. Ses cahiers deviennent les confidents de ses émotions et de ses questionnements. Elle y dépose ses rêves, ses colères, ses douleurs et ses espoirs. Écrire devient un besoin vital, une manière de comprendre ce qui l’entoure. Longtemps, elle écrit dans l’ombre. Mais une expérience collective va tout changer. Lors d’un atelier d’écriture, elle découvre la puissance du partage littéraire. Loin d’être un exercice solitaire, l’écriture devient alors un dialogue, un échange, un écho. Cette révélation marque un tournant dans son parcours.
Le coin des écrivains : un espace de liberté
De cette expérience naît une initiative précieuse : Le Coin des Écrivains. Ce club d’écriture, qu’elle fonde, rassemble des passionnés de mots de tous horizons. L’objectif est simple : créer un espace bienveillant où chacun peut s’exprimer librement, quel que soit son niveau.
On y organise des ateliers, des jeux littéraires, des discussions thématiques. Chaque rencontre est une source d’inspiration. Ce lieu devient rapidement un incubateur de créativité. Il fédère une communauté d’auteurs émergents et de lecteurs curieux. Pour Fatine, c’est aussi une façon de transmettre ce qu’elle a elle-même reçu : l’envie d’oser dire.
Une poétesse sur scène et sur papier
La poésie de Fatine ne reste pas confinée aux ateliers. Elle prend vie sur scène, dans les soirées slam, les festivals, les rencontres littéraires. Membre active de l’association SLAM’AROC et de l’Association Book Friends, elle multiplie les apparitions publiques. À chaque passage, sa voix résonne avec justesse et émotion.
En 2024 et 2025, elle participe au Printemps des Poètes à Valence-sur-Baïse (un village dans le département du Gers qui vient d’obtenir le label de ” Village en poésie “) avec l’association Cavéa. L’un de ses textes est publié aux côtés de poètes francophones reconnus. Elle s’y affirme comme une voix singulière, à la croisée du lyrisme et de la critique sociale.
Son écriture, à la fois fluide et majuscule, explore les zones grises de l’intime. Elle y aborde les tensions de l’identité, les blessures enfouies, les élans de vie. C’est une poésie qui interroge, qui dérange parfois, mais qui ne laisse jamais indifférent.
Récompenses et reconnaissance
Le talent de Fatine ne passe pas inaperçu. En 2024, elle remporte le premier prix francophone lors de la troisième édition du Prix des Jeunes Poètes, organisé par le ministère de la Culture. Un an plus tard, elle se distingue au championnat national de slam-poésie en décrochant la deuxième place. Cette reconnaissance confirme sa place parmi les figures montantes de la scène poétique marocaine. Mais Fatine garde la tête froide. Pour elle, l’important reste le message, le lien avec le public, et la sincérité de la démarche.
Au cœur de son travail, une conviction : les mots ont un pouvoir. Celui de réparer, de réveiller, de rassembler. Dans un monde fragmenté, Fatine cherche à retisser du lien. Elle écrit pour comprendre, mais surtout pour transmettre. Pour donner une voix à ce qui est souvent tu.
Ses textes parlent des femmes, de la solitude, des rêves étouffés, de la dignité, de l’espoir. Ils interrogent le silence des familles, l’injustice sociale, la beauté cachée du quotidien. Toujours avec délicatesse, parfois avec rage, mais jamais sans tendresse.
A lire aussi : Le slam marocain à l’honneur : Amine Mkallech sacré champion national
Une trajectoire en mouvement
Aujourd’hui, Fatine poursuit son chemin entre ateliers, scènes et projets littéraires. Elle prépare la publication de ses textes, tout en continuant à animer Le Coin des Écrivains. Sa démarche reste fidèle à ses débuts : créer des ponts par la parole.
Sa voix, désormais bien ancrée dans le paysage culturel marocain, ne cesse de grandir. Elle incarne une nouvelle génération d’artistes, à la fois enracinés et ouverts, engagés et poétiques. Une génération pour qui le slam n’est pas qu’un art, mais une manière d’habiter le monde.
Fatine Fatmi n’a pas fini de faire parler d’elle. Ni de faire parler les autres. Par sa poésie, elle tisse des passerelles entre les êtres. Dans ses mots, beaucoup se reconnaissent. Et si elle est montée sur le podium du slam national, c’est avant tout parce qu’elle sait écouter avant de parler, écrire avant de convaincre, ressentir avant de revendiquer.