À 19 ans, Mendy Mohamed, slameur guinéen passionné et audacieux, s’impose déjà comme une voix montante du slam. Sa plume, incisive et lucide, s’attaque avec force aux injustices sociales et aux maux de la société. En 2018, ce jeune talent découvre l’univers du slam. Une forme de poésie libre qu’il perçoit comme un outil de rébellion contre l’injustice, un moyen d’exprimer sans entrave les combats qui le traversent. À travers ses mots, il se fait le porte-voix des opprimés, des invisibles, qu’il dépeint avec une telle sincérité que chaque texte résonne comme un cri de libération.
Parmi ses œuvres les plus poignantes, “Je suis femme” incarne l’expression de son engagement pour la cause féminine. Mendy y dénonce la violence, les stéréotypes et les inégalités qui gangrènent la société. Tout en célébrant la résistance et la résilience des femmes. À travers ce poème, il met en lumière la douleur vécue en silence par les femmes. Celles qui, malgré les obstacles, continuent à lutter pour leur dignité. Et leur place dans un monde qui leur impose de multiples chaînes.
Loin de se contenter d’un simple acte d’écriture, Mendy entend, à travers son art, sensibiliser et éduquer les jeunes générations, notamment en Guinée. Son ambition est de révolutionner l’art du slam en initiant des projets éducatifs et créatifs qui permettront aux jeunes de s’exprimer. Et surtout de dénoncer les injustices, tout en valorisant la culture de la parole libre.
JE SUIS FEMME
Témoin muette de mon existence
Je cache mes blessures et mes désespoirs
Mes larmes coulent en silence
Mais chaque goutte raconte une histoireJe suis femme,
Dans une société de traditions tordues,
Où l’on dit qu’il faut baisser la tête plier les genoux
Que ma place est derrière que mon rêve est trop grand c’est là qu’ils se trompent
Et dans leurs bouches ce mot devient un cranJe suis femme
Je suis femme et pourtant
Pourtant je porte un poids que je n’ai pas choisi
Pourtant je trace ma route mais le chemin s’est envahiDans un monde moderne et éclairer
La violence continue de prospérer
Les hommes forgés dans des moules tout faits
Les femmes trop souvent réduites à des objetsMais qui t’a dit que nous devions
Nous conformer à ces stéréotypes
Qui nous empêchent d’avancerQuand je parle on me juge
On me classe
“Reste tranquille” me dit-on
“C’est la place qu’on te trace”Je me lève mon cœur saigne
Les coups, les regards, les maux me peinentDans cet océan je me noie je crève
La victime d’injustice
Un acte sans foi
Une réalité qui ne connaît pas de trêveHomme toi qui marches sans chaînes
Pourquoi donc la liberté de l’autre te peine
Serais-tu plus fort si tu me réduis
Ou est-ce le reflet d’un pouvoir détruitLa vraie force n’est pas l’équité non
Mais sans elle la domination est insensée
Crois-tu quand me rabaissant tu t’élèves
Si je monte c’est ensemble qu’on s’élèveLes coutumes comme des chaînes invisibles
Disent qu’ici l’homme est invincible
Mais qui donc te nourrit et te console
Qui t’élève, te soigne et te cajole
Mendy Mohamed