L’homme est vrai, entier, percutant et slameur ! Baffrou Joseph dit Bee Joe est un slameur ivoirien. Après quatorze années d’expérience en entreprise, ce comptable, cadre commercial et marketing décide de se consacrer exclusivement au slam en démissionnant de son poste d’alors en 2011. Cette année-là, il fait du slam sa nouvelle profession. C’est une décision qui s’apparente à un acte de révolution dans un contexte africain qui ne valorise pas toujours l’art. Surtout un art aussi ‘’naissant’’ que le slam. C’est un pari qu’il fallait tenir car la passion de l’écriture survivait en lui depuis les années 1990.
Avec d’autres ami.e.s slameur.se.s, il participe à la création du Collectif Au Nom Du Slam, dont il a été le premier président de 2014 à 2018. Cette entrée dans l’univers du slam porte des souvenirs satisfaisants lorsqu’il se souvient de son premier spectacle à Bamako au Mali, au Festival international de Slam et d’Humour en mars 2014. ‘’Ainsi débute pour moi l’étape internationale de ma carrière de slameur.’’ Dira-t-il.
Comme c’est souvent le cas dans les festivals de musique et de slam, ce fut un lieu révélateur et le Mali, une contrée de rencontres. Ils sont : Sir Black, Harmonie, Nanda, Croquemort, Jhonel, Eĺifaz, Pilote le Hot, Momo, Afrikan’da, Askim Larim, Douk, Robert Dissa, Sec Koe, H20, Saccharose, Soukey, Cheikinito, Paracétamol, Saigneur du rire… des chapelains de mots à leur façon, des semeurs d’espoir. Bamako, pour ce slameur était aussi un lieu d’appréciation du travail d’autres confrères, de joie de parler le même langage, de s’exprimer dans le même type de code.
Faire plus pour maintenir la flamme du slam en Afrique
Animateur d’atelier d’écriture et de performance, Bee Joe fait le tour de la Côte d’Ivoire au travers de ses écoles, festivals, entreprises… et de l’Afrique pour prêcher le slam dans les moindres de ses versets. Et il le fait si bien.
Avec le collectif Au Nom Du Slam, Bee Joe initie le championnat national de slam et le festival international de slam d’Abidjan, BABI SLAM dont il est le commissaire général. Ces deux activités réunissent plusieurs slameur.se.s de toute l’Afrique chaque année et offrent des plateaux d’expressions uniques où les thèmes les plus durs se mêlent à la légèreté du langage pour laisser place à la pure expression des émotions.
Un slameur au travail reconnu
Les contributions de Bee Joe dans le slam lui ont valu plusieurs reconnaissances ainsi que de belles collaborations dans le domaine littéraire. Il en est ainsi du Prix spécial du jury lors de la compétition panafricaine de slam organisé par le Goethe Institut dans le cadre du Spoken word project en 2013, en 2017 le Collectif Au Nom du Slam sera classé meilleur groupe artistique du webzine Btendance, en 2018 il remportera le troisième prix d’excellence des arts vivants de la Présidence de la République de Côte d’Ivoire puis il récidivera la même année avec le Prix pour la promotion de la poésie et du slam décerné par l’association des écrivains de Côte d’Ivoire (AECI), en 2023, il reçoit le trophée de la distinction honorifique pour la première édition du SLAM Awards International.
Participation à deux ouvrages collectifs
Il participe à l’œuvre littéraire ‘’Abidjan, ville aux multiples visages’’ de l’écrivaine Véronique TADJO. Ce recueil de courts textes, fruit de plusieurs années de collaboration avec différents acteurs culturels et auteurs confirmés ou non, donne un aperçu d’Abidjan aux éditions Eburnie.
Puis, il y aura ‘’Dadié, l’homme de tous les continents’’ un livre collectif dirigé par M. Josué Guébo aux éditions Eburnie. Ce dernier résumera la démarche en ces termes : ‘’Cent écrivains de tous les continents du monde rendent un vibrant hommage à BERNARD B. DADIÉ, celui qui contribua, mieux que tous, à dire leurs accusations et leurs espoirs ; à celui qui, plus haut que tout, aura su porter la syllabe de leurs espérances. Ils viennent surtout saluer la voix constante et inaltérée de l’homme qui a tant su parler pour eux.’’
Un slam trotteur
Au fil des années, Bee Joe est devenu une figure incontestée du mouvement Slam en Afrique. Après avoir renoncé à l’enregistrement d’un album de slam en 2011, parce qu’estimant que ce n’était pas le moment, il s’est mis en quête d’espaces pour s’exprimer, performer et présenter des spectacles de slam. D’Abidjan, il se retrouvera sur plusieurs dizaines de scènes un peu partout en Afrique. Il a participé à plusieurs festivals de slam sur le continent notamment à Durban, Bamako, Niamey, N’Djamena, Bobo-Dioulasso, Porto Novo, Conakry, Sénégal… des scènes qui ont favorisé l’écriture d’histoires touchantes.
Le slameur Bee Joe croit fondamentalement au fait que le destin de l’homme réside dans la collectivité. ‘’L’union fait la force, dit-on. Et, la force fait la richesse de chaque membre qui compose le groupe.’’
Et lorsqu’il a l’occasion de rendre hommage à ses pairs en reconnaissance du travail abattu jusqu’alors, le ton est solennel : ‘’Le parcours n’est pas un fleuve tranquille. Il y a des secousses. Mais l’esprit demeure. Au Nom du Slam, je voudrais remercier tous les membres du Collectif Au Nom Du Slam de la création à aujourd’hui. Chacun par son engagement, ses sacrifices, son intelligence, ses idées, ses contacts, à contribuer à écrire cette belle histoire. Et, elle continue. Il fallait faire connaître le Slam, nous l’avons fait. Le Slam aujourd’hui à des visages. Et, il ne se passe plus d’événements majeurs sans le Slam. Une rencontre, une famille. Soyons Humains, Soyons Slam. Demain ne sera pas aujourd’hui.’’