Mobilité et partage culturel : entrevue exclusive avec Aziz Siten’K

Lorsqu’on parle de slam en Afrique, le nom d’Aziz Siten’K s’impose inévitablement. Cet artiste engagé et visionnaire a su faire du slam son mode de vie, son “essor” et sa raison d’être. Après avoir découvert cette forme d’expression poétique en 2006 sur les ondes de la RFI, il s’y est totalement consacré, en faisant de lui un entrepreneur culturel incontournable dans son pays et au-delà.

Président et membre fondateur du groupe Agoratoire, Aziz Siten’K s’emploie à promouvoir le slam à travers de multiples initiatives, telles que la publication d’anthologies et la création d’un festival, le “Fish Mali”. Véritable “parolier nomade”, il utilise le slam comme un vecteur de mobilité, lui permettant de voyager à travers le monde et de partager sa culture avec d’autres peuples. Cette ouverture sur le monde nourrit d’ailleurs sa créativité et son inspiration artistique.

Malgré les défis liés au financement et à la reconnaissance de cette forme d’expression, Aziz Siten’K reste résolument optimiste. Il rêve de faire de l’Afrique la “place tournante du slam mondial” et travaille dans ce sens, notamment avec la création des “Slam Awards Internationaux”. Ambassadeur passionné du slam africain, cet artiste engagé et visionnaire incarne l’essor de cette discipline sur le continent.

Au-delà d’Aziz Siten’K, de nombreux autres slameurs africains ont fait de la mobilité l’un des piliers de leur pratique artistique. Qu’il s’agisse de traverser les frontières pour participer à des festivals internationaux ou de sillonner leur propre pays afin de toucher un public le plus large possible, ces artistes nomades témoignent de l’importance du déplacement dans l’essor du slam sur le continent. Néanmoins, cette quête de mobilité se heurte parfois à des défis de financement et de reconnaissance. Malgré ces obstacles, les slameurs africains restent résolument optimistes. À travers leurs performances engagées et leur esprit d’ouverture, ils contribuent à façonner une nouvelle génération d’artistes animés par la volonté de partager leurs voix et leurs cultures.

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Afro Slam : Pour toi, comment tout a commencé en tant que slameur ? Quel est ton parcours avec cet art ?

Aziz Siten’K : J’ai commencé à slamer en 2006, après avoir écouté un slameur sur RFI, cela a forgé l’envie de déclamer mes textes. À la base, je suis chanteur (R’n’B).

Mon parcours avec le slam, si je veux le résumer : le slam, c’est ma vie, le slam est mon essor, le slam a construit ma vie, le slam m’a permis d’exister et de voyager à travers le monde. Le slam m’a confirmé comme artiste et comme entrepreneur culturel incontournable.

Je suis président et membre fondateur du groupe Agoratoire, un centre culturel, la Maison Agoratoire, et le Studio Cheick Tidiane Seck.

Ma bibliographie comprend : un recueil de slam (DUNGARE: miroir), l’anthologie malienne de slam-poésie, l’anthologie des slameuses du Mali et d’ailleurs, ainsi que Slam class (l’apprentissage du slam en milieu scolaire et urbain).

Afro Slam : Pourquoi le Festival International de Slam et d’Humour – Mali en parallèle de ta carrière déjà chargée ?

Aziz Siten’K : Le fish Mali a été créé dans l’objectif de faire davantage la proposition du Slam et l’humour mais surtout le Slam en créant un brassage entre les cultures avec la participation des autres pays du monde.

Afro Slam : Cela va plaire plus de 10 ans que tu te produis dans plusieurs pays africains et au-delà. Qu’est-ce qui a été le vecteur de cette mobilité ?

Aziz Siten’K : Le vecteur de cette mobilité c’est le Slam comme je le disais plus haut, le Slam c’est ma vie, il m’a tout donné, j’ai été chanceux.

Afro Slam : En quoi la mobilité est-elle importante pour toi en tant que poète-slameur ? Quels sont les principaux bénéfices que tu en retires pour ta pratique artistique ?

Aziz Siten’K : La mobilité nous permet de connaître les peuples et leurs cultures, et aussi de partager les nôtres. Elle nous renforce vraiment et élargit notre relationnel. Ce qui est très important dans le show-business.

J’aime bien le titre “le parolier nomade”. Voyager avec son art est la plus belle grâce que Dieu m’a donnée, et je le souhaite à tous les autres artistes.

Afro Slam : De quelle manière ta mobilité influe-t-elle sur ton processus de création ? Est-ce que les lieux où tu te produis ont un impact sur ton écriture ?

Aziz Siten’K : Ma mobilité influence sur ma création en terme d’inspiration et de renforcement de ma culture générale.

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Afro Slam : Avec ton expérience par rapport au FISH – Mali, dirais-tu qu’il est facile pour un slameur africain de bénéficier d’un soutien dans la mobilité pour ses créations, ses concerts et les festivals ?

Aziz Siten’K : Je ne dirais pas que c’est facile mais il faut être vraiment entreprenant, cela vous amène à chercher sans relâche, à profiter des opportunités c’est comme ça que ça marche. Assis, tu ne n’obtiens rien !

Afro Slam : Quels sont les principaux soutiens sur le continent africain (institutionnels, financiers, logistiques, etc) qui appuient et facilitent les déplacements des slameuses et slameurs ? Sont-ils faciles d’accès ?

Aziz Siten’K : Sur le continent africain, nous avons le fonds africain de la culture, l’OIF, les instituts français et les ambassades françaises. Mais généralement, sur demande ou les appels à projets et réussir n’est pas toujours évident.

Afro Slam : Comment la technologie peut de nos jours aider les artistes slameurs à gérer leur mobilité ?

Aziz Siten’K : Ce que la technologie peut faciliter, c’est vous offrir des opportunités. C’est à vous d’aller les chercher et, souvent même, de vous faire inviter ou de vous inviter vous-même sur les événements… En un mot, il faut oser. Créer un bon réseautage et, après, la mobilité devient super facile.

Afro Slam : Quelles différences observes-tu entre la mobilité des poètes-slameurs établis et celle des artistes émergents ? Quels sont les enjeux spécifiques à chaque catégorie ?

Aziz Siten’K : Chez moi, il n’y a pas de différence, je conseille aux deux la constance.

Afro Slam : À l’échelle africaine, comment perçois-tu les différences de mobilité entre les poètes-slameurs de différents pays ? Quels sont les facteurs qui influencent ces disparités ?

Aziz Siten’K : Le probleme de financement est un enjeu majeur. Tout se joue à ce niveau.

Afro Slam : Selon toi, quelles seraient les mesures les plus efficaces pour améliorer la mobilité des poètes-slameurs à l’échelle locale, nationale ou africaine ?

Aziz Siten’K : Trouver des mécènes des sponsors ou des partenaires efficaces sur de long termes cela revient à imposer notre art davantage et fidéliser nos publics.

Afro Slam : Beaucoup de poète-slameurs emergents estiment que les festivals sont inaccessibles parce qu’il faut au préalable avoir un réseau ou des affinités avec les organisateurs pour être programmé. Est-ce vrai ?

Aziz Siten’K : Pas forcément, je pense que le problème est plus d’ordre budgétaire. Sinon le talent ne ment jamais . Si un slameur est bien il se fera inviter s’il sollicite les organisateurs d’un événement et qu’il rempli toutes les conditions requises.

Afro Slam : Comment imagines-tu l’évolution de la mobilité des poètes-slameurs dans les années à venir ? Quelles tendances ou innovations pourraient transformer ce domaine ?

Aziz Siten’K : Les choses iront de mieux en mieux si les leaders, disons les entrepreneurs arrivent a créer un réseau efface pour trouver des fonds de mobilités uniquement pour le Slam en impliquant les États.

Afro Slam : As-tu des nouvelles à nous donner par rapport à la prochaine édition du FISH – Mali ?

Aziz Siten’K : Le fish prochain c’est en mars 2025 nous sommes en préparation c’le sera la 12eme édition.

Afro Slam : Quel est ton plus grand rêve pour le slam-poésie africain ?

Aziz Siten’K : Mon rêve c’est de faire de l’Afrique la plaque tournante du Slam mondial avec notre nouvelle initiative slam awards international.

Afro Slam : Des projets en cours ?

Aziz Siten’K : Nous préparons la deuxième édition de Slam awards international qui aura lieu le 7 décembre à Bamako.

Afro Slam : Un dernier mot à l’endroit de nos lectrices et lecteurs ?

Aziz Siten’K : Slam forever !